Fin 19e siècle, les Trois Ponts ne sont que quelques hameaux reliés au bourg par d’étroits chemins de terre, des pieds sentes, arrosés par un riez prenant sa source à Hem, irriguant les terres de la ferme de la « Petite-Vigne « , alimentant les fossés de la ferme de Courcelles et traversant les hameaux du Pile et des Trois Ponts pour enfin se jeter dans l’Espierre au Sartel. Sans doute ce riez était-il traversé par trois ponts en planches, ceux-ci permettant de le franchir plus aisément, donnant ainsi son nom à ce secteur de la ville. D’ailleurs, en 1847, un Conseiller municipal signalait la défectuosité de ces chemins de terre reliant le bourg aux hameaux, en particulier celui des trois ponts, que la mauvaise saison avait rendu impraticable.
Les trois ponts en 1900, c’est donc la campagne (une rue Brame qui ne compte que trois maisons, dont deux estaminets), des champs de céréales, des pâturages avec au loin les péniches chargées de charbon traversant le quai du Sartel, et aussi un garde champêtre, Charles Denoyelle, que les témoins décrivaient comme imposant et solennel dans son uniforme.
Le Carihem de la Belle Epoque c’est aussi le célèbre stand de Tir National, derrière la gare du Pile que le tramway, le » H « , desservait jusqu’à la gare de Roubaix. La Société de Tir national, née en 1859, au cours d’une réunion au café Ma Campagne pendant laquelle quelques amis (parmi lesquels Gustave Nadaud), à l’occasion de la Sainte Barbe, décidèrent de créer une société de tir qui, après quelques pérégrinations sur l’emplacement du Parc Barbieux, puis de la rue Ampère au Galon d’Eau, vint finalement s’installer, en 1910, au Carihem.
Puis, de vastes opérations d’urbanisme dessinèrent dans ce village, ce qui sera plus tard le quartier des Trois Ponts. L’épine dorsale sera constituée de la belle avenue de Verdun, débouchant sur le boulevard Salengro, face à l’avenue Van der Mersch. L’avenue Brame, elle, perpétue encore le souvenir du député de Roubaix, de Lannoy et de Cysoing, qui devint ministre de l’Instruction publique sous le Second Empire, et dont le ministère pris fin après la défaite de Sedan.
C’est en 1960 que l’histoire du quartier des Trois Ponts prend un tour décisif ; en novembre, le Conseil municipal se prononce pour une demande de déclaration d’utilité publique ayant pour conséquence majeur une vaste expropriation des maisons du quartier afin de transformer ce secteur en une grande zone à urbaniser prioritairement. Après le quartier Edouard Anseele, l’on vit donc les habitants quitter, non sans regrets, et à la suite de nombreuses difficultés, leurs maisons et les fenêtres rendues aveugles par les murs de briques.
Ainsi la superficie de 25 hectares du quartier ne comptabilisera désormais guère plus de 2 hectares de bâtis, laissant 17 hectares qui seront occupés par les futurs collectifs et les tours qui allaient s’élever. Douze ans après la décision du Conseil municipal, l’opération » ZUP des Trois Ponts « prit forme, inaugurant le nouveau quartier des Trois Ponts.