La gare et les voies du chemin de fer avaient séparé le quartier du Fresnoy du reste de la ville à laquelle il était relié par la rue de Mouvaux et la rue Saint-Vincent de Paul (aujourd’hui disparue). C’était un gros inconvénient que subissaient tous les jours les habitants du quartier et toute la population ouvrière que le métier appelaient au Fresnoy.
Il n’y avait qu’un seul remède à cette situation : établir une passerelle près de la gare, au-dessus des voies ferrées. Comme toujours, ce sont les choses les plus utiles qui mettent le plus de temps à se réaliser. Déjà en 1885, les habitants du Fresnoy avaient essayé d’obtenir une passerelle. Un syndicat s’était formé entre les propriétaires pour trouver une somme importante à offrir à la ville comme participation à cette dépense. Mais la Compagnie du Nord, se réservant le droit de la construction de la passerelle, présenta deux projets, l’un de 65.000 francs et l’autre de 80.000 francs. Les pourparlers entre la ville, les propriétaires et la Compagnie du Nord n’aboutirent pas. Le quartier, à cette époque, ne comptait que trois mille habitants.
Vingt ans après, la population ayant plus que doublé, la passerelle devenait de plus en plus une nécessité. Après bien des vœux restés sans résultat au Conseil général ou au Conseil municipal, la question était remise sur le tapis en 1904 par Jules Noyelle. Un nouveau syndicat de propriétaires s’était formé et avait réuni une vingtaine de mille francs, grâce aux efforts de M. Edmond Dujardin.
La passerelle était enfin terminée et inaugurée le 14 septembre 1908 et on lui donna le nom du principal promoteur de cette utile construction.
Edmond DUJARDIN
C’était une personnalité très connue et très sympathique à Roubaix. Il était Président d’honneur du cercle colombophile l’ « Union », et, en cette qualité, il fut nommé chevalier du Mérite Agricole en 1902.
Il était l’un des plus anciens et des plus actifs « coulonneux » de la région. Dès sa jeunesse, il s’était occupé de ce sport si utile et si intéressant au point de vue de la Défense nationale (à cette époque, tous les pigeonniers étaient soumis à une autorisation militaire et minutieusement référencés sur les cartes d’état major). Grâce à des expériences raisonnées et suivies, il était arrivé à le perfectionner et à posséder le pigeonnier le plus pratiquement installé et le plus beau qu’il soit possible d’imaginer. Il partageait son savoir-faire en faisant visiter ses installations à toute personne passionnée comme lui-même de colombophilie.
Edmond Dujardin est décédé accidentellement, le 26 août 1909, à l’âge de 60 ans. Il s’était rendu à Ostende avec un groupe d’amis. Au retour, en automobile, les excursionnistes étaient parvenus, vers six heures du soir, à l’entrée du petit village de Woesten, à 10 kilomètres d’Ypres, sur la grande chaussée dite « du Roi » qui va d’Ostende à Menin par Furnes et par Ypres, lorsqu’ils tamponnèrent un cabriolet. L’automobile fut renversée et deux des voyageurs, Edmond Dujardin et Paul Catteau, furent tués sur le coup.